Cour des aides

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Les Cours des aides sont des cours souveraines d'Ancien Régime créées pour traiter du contentieux des finances extraordinaires (c'est-à-dire de nature fiscale), les finances ordinaires (domaniales) relevant de la chambre du Trésor.

• Les Cours des aides jugeaient en appel, sauf exception (créances et dettes de l'État notamment), des décisions des juridictions d'exception de premier ressort spécialisées dans les affaires fiscales (élections, juges des traites, greniers à sel, bureaux de finances). Toutefois, les impôts les plus récents, établis de la seule autorité du roi (capitation, dixième, vingtième) leur échappaient, ce qui suscitait de leur part de vives remontrances, notamment celles de la Cour des aides de Montauban.
• Les Cours des aides jugeaient également des privilèges fiscaux, donc notamment de la validité des titres de noblesse.
• Au criminel, elles jugeaient des crimes et délits en violation des lois fiscales, qu'il s'agisse de la répression de la contrebande ou des abus commis par les gens des fermes.
• Sur le plan administratif, elles participent à la répartition de la taille.
• Sur le terrain politique, elles procédaient à la vérification des lois fiscales et financières avec droit de remontrances. La Cour des aides de Paris s'illustra particulièrement dans ce domaine (voir infra).

La Cour des aides de Paris a été créée par une ordonnance de 1389 et son existence s'est stabilisée en 1426 dans la foulée des nouveaux impôts établis pendant la guerre de Cent ans. La première cour des aides provinciale, celle de Languedoc, est mise en place en 1437 ; d'abord ambulatoire, elle se fixe ensuite à Montpellier. Les créations les plus récentes seront celles de Clermont-Ferrand (1557), Bordeaux (1659) et Montauban (1661).Les officiers de la Cour des aides de Paris reçurent la noblesse au premier degré en 1645.

Treize cours des aides seront ainsi constituées : neuf d'entre elles réunies soit à une Chambre des comptes (Aix, Montpellier, Rouen), soit à un Parlement (Besançon, Grenoble, Metz, Pau, Rennes), une (Dijon) ayant été réunie successivement à la Chambre des comptes puis au Parlement, les quatre autres étant autonomes (Paris, Clermont-Ferrand, Bordeaux, Montauban) car il avait paru imprudent de les réunir à des Parlements en rébellion contre le pouvoir royal.

Dans certaines provinces (Flandre, Artois), il n'y avait pas de Cours des aides, le contentieux fiscal relevant des cours souveraines de droit commun.

[modifier] L'affaire Monnerat

La Cour des Aides eut comme adversaire redoutable le Chancelier René Nicolas de Maupeou et était en conflit permanent avec le pouvoir royal à la fin des années 1760. Les magistrats Malhesherbes et Boisgibault ont été convoqués le 31 juillet 1770 par Louis XV à propos de l'affaire Monnerat, après plusieurs correspondances avec Maupeou. Monnerat avait été détenu 20 mois dans les affreux cachots souterrains de Bicêtre sur un simple soupçon de contrebande. Libéré, il adressa à la Cour des Aides une plainte contre les fermiers généraux. La Cour dénonça l'abus qui était fait des lettres de cachet mais la juridiction de la Cour a été entravée par un arrêt d'éviction. Louis XV prononça les sèches et dures paroles que voici :

« Les défenses portées par les arrêts de mon conseil, les 25 juin et 15 juillet derniers ne vous ont point empêchés de donner une suite à vos arrêts que j'ai cassés. Je vous défends d'aller en avant sur cette affaire; si vous avez des représentations à me faire, je les écouterai après que vous m'aurez obéi. Le premier Président et deux Présidents viendront vendredi 3 Août à midi, me rendre compte de la délibération que vous aurez prise à ce sujet ». Exécutant l'ordre royal, Malesherbes et Boisgibault sont retournés le 3 août 1770 voir Louis XV qui se borna à leur dire : «J'entends que cette affaire est terminée et que vous ne donnerez aucune suite ».

Mais la Cour a déjà décidé, dans sa séance du 1^er août, de faire au Roi de nouvelles remontrances, et ce seront celles du 14 août intitulées: Remontrances au sujet des vexations injustes contre le sieur Guillaume Monnerat. Ainsi, la Cour des Aides jetait un défi au pouvoir royal et se déclarait ouvertement en état de guerre.

La rébellion continua en 1771. Le Conseil d'État du Roi qualifia un arrêt et arrêté du 22 mars 1771 de la Cour des Aides comme attentatoire à l'autorité royale et contraire au respect qui était dû au souverain. Il faisait défense à la Cour des Aides de prendre de tels arrêts et de former de tels arrêtés à l'avenir. Le Roi ordonna que le registre de la Cour lui soit apporté. Malesherbes accompagné des présidents de Boisgibault et de Montreuil et du greffier Dutrequin se sont rendus à Versailles le mercredi 27 mars 1771. Le récit de l'entretien devait être fait aux chambres assemblées à la séance du 9 avril. Il ne put l'être en raison des violences faites à la Cour qui dut se séparer sans avoir délibérée. Les magistrats sont entrés ce jour là dans le cabinet du Roi où se tenaient, autour de Louis XV, le Chancelier de Maupéou, l'abbé Terray, le duc de la Vrillère et quelques seigneurs. M. de Boisgibault prit la parole pour dire au roi qu'ils étaient venus en exécution de ses ordres. Sur le champs, le Roi lui coupa la parole pour dire qu'il avait cassé l'arrêté du 22 mars par un arrêt de son Conseil qui allait être inscrit en marge des minutes. Boisgibault dit au Roi « Sire, nous rendrons compte à votre Cour des Aides...» . Le Roi repris sur le champs la parole et dit : « Retirez vous ». Ils se retirèrent dans la chambre du premier valet de chambre.

Par la suite, un plan secret de conduite pour la suppression de la Cour des Aides allait être pris par le Gouvernement. Ce plan d'ensemble était accompagné d'une instruction du roi au Maréchal de Richelieu, Pair de France, gouverneur général et commandant en la province de Guyenne, qui était choisi pour aller porter les ordres du Roi à la Cour des Aides assisté de M. de Chaumont de la Galaizièez et d'Ormesson.

Richelieu remit à Boisgibault une lettre de cachet du Roi, adressé à M. Cordier de Montreuil, ou à son remplaçant par laquelle Louis XV demanda au Président de faire tout ce qui dépendra de lui pour que sa volonté soit ponctuellement exécutée. Puis le Maréchal, ayant ôté et remis son chapeau, annonça qu'il apportait les ordres royaux que M. de la Galaizièez allait expliquer dans le plus grand détail; il remit le pli contenant ces ordres aux mains de M. de Boisgibault. M. de Boisgibault reçut une lettre de cachet qui l'exila à sa terre d'Ardon. Les Présidents Hocquart, Choart, Bernard et de Fautras seront aussi exilés.

Chrétien Guillaume de Lamoignon de Malesherbes a été Président de la Cour des Aides avec Jacques Charpentier de Boisgibault. Ce dernier était un fils de la famille Charpentier qui avait acheté le Château de Boisgibault, d'Ardon dans le Loiret en 1712, six ans avant que la famille Lamoignon ne rachète celui de Malesherbes. Chrétien-Guillaume et Jacques ont été connus comme Messieurs de Malesherbes et de Boisgibault, c'est à dire par le nom de leur propriété respective du Loiret et non par leur patronyme d'origine. C'était une coutume de l'époque, pour les gentilhommes, de se rajouter une particule avec le nom d'une terre, sans que cela ne soit pour autant un signe de noblesse. Les deux châteaux de Malesherbes et de Boisgibault sont aujourd'hui dans le même département et classé. Jacques Charpentier de Boisgibault est mort à la Révolution et tombé dans l'oubli contrairement à Malesherbes.