António Ramos Rosa

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António Ramos Rosa est un écrivain portugais né en 1924.

Un chemin de la modernité

On ne peut pas faire l'inventaire de l' œuvre de ce poète sans se mettre soi-même en diapason de la partita qui la mène. Ce qui fait reconnaître un texte de Rosa c'est qu'il réalise la " structure Rosa " , une configuration ou un bassin sémantique singulier. Le diapason fait vibrer une peur admirative de l'indiscrétion du révélé. Il provoque le vertige d'un réapprendre à voir . La genèse n' est concevable que dans un mouvement. Ici les textes du poète s'inscrivent dans la modernité, dans le sens à venir. Parce qu'il y a des manques, des espaces encore libres offerts à l'ignorance. Ainsi la psychanalyse orthodoxe serait disqualifiée comme grille de lecture puisqu'elle a toujours raison dans son principe. Inversement le langage de la recherche de l' homme sur le sens exige une discontinuité. L'interruption devient sens et la rupture est sa forme. L'histoire de l'art en témoigne largement. Modernité encore que d'exprimer ainsi l'impossible continuité du réel et de l'imaginaire ou du désir. Antithèse parfaite de l'image en réelle, de la TV réality qui dans leur forme bruyante laissent croire que nous allons accéder au fond des choses. Qui postulerait la continuité de ce qui est.

Saveur et savoir

Dans le mythe d' Œdipe, Tiresias ,le devin aveugle , voit le mystère mais il ne le sonde pas. Ce n'est pas un expert qui va au fond des choses mais quelqu'un qui est au centre d'un système qui ne produit ses effets que par ses manques. L'œuvre de Ramos Rosa re-propose une historicité secrète et salvatrice. Une réintégration possible du sens pour notre temps qui intègre peu à peu l'urgence d'une réconciliation de saveur et savoir. De réintégrer la parole à la fraternité du monde dans l'espace même de sa question. La première parole que Dieu adresse à Adam c'est une question : " Adam où es-tu ?". Tout commence donc par un manque. Dieu ne sait pas où est sa créature ! Il questionne. Vivre la poésie de Ramos Rosa c'est respirer un peu de ce monde ouvert qui littéralement va dans tous les sens nous libérant ainsi de toute continuité et orthodoxie aliénantes. Le langage offre ici une possible jonction de l'individuel et de l'universel : il parle et il nous parle sans concession ni soumission statutaire ou institutionnelle. De tels textes nous proposent un corps imaginaire qui anime. Non pas pour un temps de rêverie ni pour des idées mais plutôt pour une matrice d'idées , un langage conquérant qui ne se contente pas d'énoncer ce que nous attendions. Il permet qu'une part de nous-même non reconnue se trouve réconciliée dans une évidente "saveur unique".

Une conscience poétique

Ramos Rosa a reçu tous les prix littéraires possibles dans son pays. Et cela n'a pas entamé la discrétion de sa présence pourtant et paradoxalement emblématique du retrait , de la distance inhérente à l'expression portugaise.